Il y avait leur fumée, qui en volutes éparses troublait le ciel orange. Orange mécanique, îlot de couleur étrangement sale, amèrement doux, perdu dans l'infinité des étoiles.

Il y avait le rire. Leurs rires, qui lui semblaient si lointains et dénués de sens, qui se heurtaient à la paroi si hermétique de sa bulle éthérée, érigée par la nouvelle téléphonique. Elle aurait voulu leur hurler son désarroi, remplir de sa haine ce si joli espace douillet et confiné, non sans les avoir cependant figés au préalable en patins de pierre, histoire de na pas regretter ce cri silencieux.

Il y avait la bruine, qui s'égrenait sur leurs visages, tandis qu'elle tentait elle aussi de s'envoler sur le béton vers les illusions, mais bien vite le poids de son humanité la cloua au bitumé pointillé de gouttelettes.

Il y avait les gens, mais juste elle, sa musique, et le crissement ferraillé, bétonné, des murs souterrains qui défilaient derrière son crâne embrumé, encombré. Encimenté.

Il y avait la rue, ses lumières tant que ses ombres, ses humains qui faisaient sourire. Et ceux qui instillaient une peur compréhensible mais irraisonnée, faisant trembler et s'entrechoquer les mots dans sa bouche. Pourtant, le second brillait.

Il y avait le vent, qui l'invitait sur la Lune, en traître. Elle ignora à contre-coeur la proposition et ne fit que l'écouter chanter, doux et passionné à la fois.

Il y avait le glissement tout d'abord violent, puis soyeux, des crins de plastique contre ses cheveux. Le réconfort physique et si simple que cela apportait.

Il y avait cette chaleur, malgré le froid ambiant, cette gorge enflée, asséchée. Ces picotements dans les pieds et la sueur.

Il y avait cette terreur, fruit ou cause des cauchemars, nombreux et oubliés. Les rares accalmies de peur, les cheveux collés à la tempe, les mains agrippées à la couette.


Tempête semi-consciente de l'imaginaire anxieux.

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[Where is my mind ?]